Tallinn - Jour 2 - Partie 4 - La colline du pouvoir

Nous sommes toujours dans la vieille ville de Tallinn, à suivre les indications de notre audioguide qui continue à nous mener de découverte en découverte...


Nous sommes dans la rue Rüütli, juste derrière l'église Saint Nicolas.
Cela ne se voit plus aujourd'hui mais une bonne partie de la rue fut détruite durant la seconde guerre mondiale par un raid aérien russe. Les bâtiments historiques ont été reconstruits à l'identique...


Il y a 3 sites remarquables dans cette rue. 
Tout d'abord l'écurie, ou cour marchande municipale, ancien haut lieu du commerce. 
Au bout de la cour de cet édifice il y avait bien sûr une écurie, mais aussi une fonderie qui avait été transférée ici depuis la place de l'hôtel de  ville. On y fondait les canons et les cloches des églises... 
Il y avait également ici une armurerie ainsi qu'une frappe de monnaie. Bref, tout ce qui tournait autour des métaux... 
Pendant un temps, les lieux servirent également de prison 'pour riches', et on raconte que cette prison était hantée... C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la prison aurait été fermée.



Presqu'en face il y a le nouvel hospice où l'on accueillait les malades nécessiteux, et qui attirait également les plus pauvres de la ville. En effet, le repas servi ici pouvait avoir à son menu de la viande et de la bière, chose que les plus nécessiteux ne pouvaient s'offrir à chaque repas. La viande était issue des invendus des marchands de l'hôtel de ville.


Et puis le troisième édifice, la maison du bourreau, nous permet d'en apprendre un peu plus sur cette profession méconnue et surtout méprisée. 
La maison est facile à repérer grâce à sa girouette en forme de hache.
Employé par la municipalité, le bourreau n'était pas beaucoup aimé de par sa profession. De plus dans la vie de tous les jours il subissait maintes discriminations:
Par exemple il devait toujours porter un manteau rouge écarlate afin de pouvoir être identifié. 
Ni lui ni sa famille n'étaient autorisés à aller à la messe, et ses enfants ne pouvaient pas aller à l'école. 
Pour certaines personnes le simple fait de lui serrer la main était considéré comme un déshonneur.


Un gouverneur finit par tenter de redonner un peu de dignité à ce pauvre bourreau. Il promulgua un décret qui donnait à celui-ci et à toute sa famille le titre d' "honorable sujet du Roi", autorisait à ses enfants de fréquenter l'école, et punissait d'amende quiconque lui manquait de respect.
Le bourreau n'avait pas pour seule fonction d'exécuter les condamnés: il devait également débarrasser les rues des cadavres d'animaux et nettoyer les latrines publiques.
Pour l'anecdote, voici les supplices successifs qui étaient réservées aux sorcières: on leur arrachait les chairs au moyen de fers chauffés à blanc, puis on leur brisait poignets et chevilles, on leur arrachait le cœur, on les décapitait et enfin on les brulait... pfiou...



Il est temps pour nous de prendre de la hauteur pour aller vers la ville haute, sur la colline de Toompea. Et oui, ça va monter... Nous empruntons la ruelle qu'on appelle 'la courte jambe', courage!
En haut, c'est Toompea, la ville des riches et des nobles, séparée de la ville basse et de sa populace. 
Il fallait montrer patte blanche pour y accéder, les portes étant gardées par des soldats et protégées par des tours comme celle-ci, qui date du XVème siècle.


Aujourd'hui cette tour est le siège d'un groupe musical spécialisé dans les musiques médiévales. 
Bien sûr, elle est également hantée et ce serait ici carrément un navire entier qu'on aurait vu traverser les murs.
Jadis cette porte était fermée chaque soir. Et de nos jours aussi, une fois par an pour la fête de la ville, a lieu la cérémonie du toquage: on ferme à nouveau la porte et le premier ministre en personne doit alors venir frapper à la porte pour demander le droit de passer.


Après la porte, on accède à un premier promontoire et une première vue sur les toits de la ville s'offre à nous. 



Il y a aussi des canons et un trou qui permet de passer sous les fortifications qui sont juste derrière nous...


Notre audioguide, de son côté, nous parle de la tour carrée par laquelle passe le chemin de ronde: la tour de l'étable. Elle servait jadis de prison de luxe. En effet d'ici les occupants prisonniers avaient de larges fenêtres qui donnaient même sur le château de Toompea (de l'autre côté par rapport à nous).
A noter que les fantômes de la prison avaient comme particularité de se promener sans tête...
Quand à la tour de la vierge, juste à côté, c'était aussi une prison mais dédiée aux... prostituées! Il n'y avait donc pas de vierge à la tour de la vierge...
Cette tour était elle-aussi hantée: on y entendait des rires et des chansons, et parfois les objets disparaissaient.



Nous croisons un groupe de collégiens français en voyage qui se baladent avec leur drapeau (certainement des supporters) puis nous passons devant le stand de tir à l'arc pour venir admirer la grande tour ronde que voilà, qui porte un nom allemand: "Kiek in de Kök". C'est l'une des plus hautes tours de la ville, et en passant notre audioguide nous informe que lors de sa constructions les ouvriers consommèrent plus de 22000 litres de bière, de quoi donner du cœur à l'ouvrage!



Kiek in de kök est une structure unique dans tous les pays baltes. Tour de défense par excellence, elle faisait 45 mètres lors de sa construction mais suite à plusieurs attaques les plus hauts étages furent détruits, supprimant le toit convexe et ses gargouilles. Elle fait maintenant 38 mètres de haut.
Son nom veut dire en vieil allemand "un coup d'œil dans la cuisine", car on disait qu'elle était tellement haute qu'on pouvait d'en haut jeter un œil dans toutes les cuisines des environs... y compris celles de l'ennemi.
La tour possédait 57 bouches à feu d'où on pouvait faire tirer canons et fusils.
Nous reviendrons ici mais pour l'instant continuons notre chemin...


Avant de continuer notre grimpette, nous faisons un tour dans les jardins qui ont été installés à l'emplacement des anciennes douves, et qui donnent un superbe point de vue sur les fortifications depuis l'extérieur...


Nous voici maintenant tout en haut de la colline, centre véritable de la ville avec à gauche le château et à droite la cathédrale orthodoxe russe.
Au tout début le château de Toompea ne ressemblait pas à cela: il était ovoïde avec des tours crénelées comme au temps du moyen âge. Son enceinte occupait même presque toute la colline. C'était à l'époque où le pays était contrôlé par les chevaliers porte glaive, des moines-chevaliers germaniques.
Par la suite la colline fut coupée en deux avec une partie gérée par les instances religieuses et celle gérée par le château que nous voyons là (de style baroque).
De nos jours il abrite le parlement estonien.



Passons sur la gauche dans le jardin du parlement pour aller voir notre ami Hermann Le Grand. C'est le nom qui a été donné à cette haute tour ronde et fière de 50 mètres. C'est la plus haute de la ville et elle tire son nom d'un héros mythique allemand à la force extraordinaire.



En 1922 on y installa un drapeau de la toute nouvelle république estonienne (après la guerre qui permit de voir le départ de l'occupant russe). Cela fut de courte durée car comme nous le savons le pays a été occupé dés le début de la seconde guerre mondiale jusqu'en 1989 où l'empire soviétique se disloqua.
Mais bien avant 1922 les drapeaux se sont succédés en haut de cette tour: le drapeau danois, puis allemand, suédois et enfin russe.
La première république russe fut proclamée en 1918, et c'est d'ailleurs son centenaire cette année, ce qui explique toutes les affiches '18' que l'on a pu voir un peu partout dans la ville...
Et quand au drapeau estonien, il est composé de 3 couleurs: le bleu pour le ciel, le noir pour la terre et le blanc pour la neige. Il fut strictement interdit sous l'ère soviétique...


Nous revenons sur nos pas pour nous diriger vers l'impressionnante église orthodoxe Alexandre Nevski. On entre  dans la nef en plein office religieux et je n'ose pas vraiment prendre des photos. Néanmoins nous assistons à un très bel office: des chœurs féminins résonnent du haut de la cathédrale alors que le pope psalmodie ses prières. Il y a pas mal de fidèles et comme toujours dans les églises orthodoxes les femmes sont voilées.
Construite en 1900 sous l'occupation russe du tsar Nicolas II (qui est venu l'inaugurer en personne), sa construction fut fastidieuse et jalonnée d'incidents. Les estoniens racontent que c'était parce que la cathédrale devait être édifiée sur le tombeau de Kalevi, héros mythologique local. Ils espéraient même que celui-ci, en se retournant dans sa tombe, ferait fissurer les murs de la cathédrale.
Le bâtiment, symbole de la domination de l'occupant russe, a faillit être détruit à la révolution...


Nous nous baladons maintenant dans les rues de Toompea, où se trouvent en plus du parlement plein d'autres bâtiments administratifs. Il y a aussi plusieurs ambassades, comme celle de France dont on reconnait le drapeau tricolore...



Nous passons devant l'école épiscopale, qui est le n°20 sur notre plan. Celle-ci fut édifiée par les prêtres de la cathédrale Tomkirik qui se trouve un peu plus loin, afin d'offrir une éducation convenable aux enfants des familles les plus aisées de la bourgeoisie locale. C'était même presque obligatoire car si un citoyen n'y envoyait pas ses fils il devait payer une amende. L'école était néanmoins difficile d'accès pour les élèves qui venaient pour la plupart de la ville basse: il fallait passer les points de contrôle puis grimper sur la colline (plus de 300 marches), et parfois sous la neige.
L'école était également hantée par deux fantômes: la dame noire (une jeune fille qui aurait été emmurée vivante dans la maison) et la dame grise.


En face, voici la cathédrale Tomkirik, qui parait petite par la taille mais a une haute importance pour la ville. Elle fut construite par les même chevaliers porte-glaive qui décidèrent de faire de Toompea le centre du pouvoir religieux du pays. C'est le plus ancien bâtiment de Toompea encore debout.
Normalement on peut monter en haut du clocher mais il est 17h passé et tout est fermé (je l'avais néanmoins visité lors de mon précédent voyage).


On continue? Nous passons par derrière en prenant la rue Kiriku (comme le dessin animé) pour arriver devant la maison Stenbock.




Appartenant à l'une des plus riches familles estoniennes, cette maison aux allures baroques est maintenant le siège de la république d'Estonie, ce qui explique les deux drapeaux et les grilles fermées. Ici ce seraient les fantômes des ouvriers qui construisirent l'édifice qui hanteraient les caves du bâtiment. A l'étage aussi il y a un autre fantôme: celui d'une jeune fille qui aurait vécu là, battue à mort par un oncle méchant et cruel...



Je sais pas vous, mais je me demande si à Tallinn il n'y a pas plus de fantômes que d'habitants!
Une autre histoire plus récente (1979) date de l'époque où la maison des Stenbock faisait office de cour de justice. Imre Arakas, criminel  notoire, fut arrêté pour avoir tenté de fuir le pays (c'était sous les soviétiques). Il échappa à la vigilance de ses gardes et sauta par une fenêtre pour atterrir indemne tout en bas de la colline (une chute de plus de 10 mètres de haut). 


Fatigués? Rassurez-vous notre visite guidée touche bientôt à sa fin. Elle nous aura bien occupé pendant toute la journée! Derrière un porche on aperçoit plein de monde: c'est l'un des promontoires permettant d'observer la ville d'en haut.


Séance photo obligatoire! On a une superbe vue d'ici, avec les tours et les fortifications, Saint Olaf et juste derrière la mer baltique.
Notre guide audio tient alors à nous parler des naufrages célèbres qui eurent lieu dans le coin et notamment du plus récent d'entre eux, celui du ferry Estonia en 1994. Il fit 852 victimes.



Notre copine audio phonique en profite pour nous parler également de l'Histoire de l'Estonie, pays ballotté entre les grandes puissances voisines: danois, chevaliers allemands, suédois puis russes et soviétiques. La libération du pays en 1989 fut le résultat de ce que l'on appelle la révolution chantante, un mouvement de protestation pacifiste des années 80. Lors des festivals et des fêtes, les gens se sont mis spontanément à entonner des anciens chants patriotiques -alors interdits. Toujours en chanson, ils défilèrent lors de manifestations nocturnes durant lesquelles l'ancien drapeau bleu blanc noir (lui aussi interdit) réapparut.


D'ici on aperçoit très bien les visiteurs qui sont montés tout en haut de l'église Saint Olaf. Ce matin nous étions exactement là. Ce fut notre première visite de la journée... on peut dire que la boucle est bouclée!


A quelques pas de là, nous rejoignons un deuxième point de vue, qui donne cette fois-ci au dessus de la place de l'hôtel de ville. On aperçoit au fond les buildings du quartier d'affaire qui paraissent bien éloignés des toits du vieux Tallinn...


Après cette journée pleine d'agitation et de découvertes, le calme semble retomber sur les toits de Tallinn...


De quel côté allons nous repartir maintenant? Vers la gauche...


... ou vers la droite?


Nous en avons fini avec la ville haute et il faut donc maintenant... descendre (bin oui, vous suivez?). 
La longue jambe, c'est le nom donné à cette longue rue en pente, seul accès à la ville haute jusqu'au 17ème siècle. 




Elle se termine d'ailleurs par une tour de garde qui réglementait les entrées et les sorties. et de façon très efficace puisqu'en 1991 on bloqua ici les chars soviétiques venus "rétablir l'ordre": on déposa des blocs de granit au bon endroit, empêchant les chars d'atteindre le parlement...
Et... le croirez-vous? La rue de la longue jambe est elle-aussi hantée. Par un colosse de 3 mètres sans tête. Original, non?


Notre dernier arrêt se trouve dans la rue Lai. Ça vous dit quelque chose? C'est dans cette même rue que nous avions commencé notre visite ce matin. La rue Lai ('large' en estonien) est la plus large de la vieille ville et fut jadis dévolue aux écuries puis aux immeubles abritant artisans et ouvriers.



Je suis intrigué par cette statue, dont ne semble pas vouloir parler l'audioguide. C'est celle de Ferdinand Veike, marionnettiste et fondateur du théâtre qui se trouve juste derrière, le NUKU.



Voilà, notre visite avec audioguide est terminée! On est libres pour la soirée!
En fond sonore, on entendra maintenant les supporters russes qui regardent le match du soir dans les bars et pubs que nous croiserons.


Au passage, je fais remarquer à Frédéric l'enseigne de ce petit bar caché dans cette ruelle: le DM baar... ça te fait penser à quoi? DM c'est pour... Depeche Mode, le groupe préféré de notre pote Fred! 
Ce bar serait classé n°6 dans les bars les plus bizarres selon le Lonely Planet.
C'est promis, on reviendra demain y boire un verre (obligé)... 
En attendant nous allons plutôt chercher un restaurant pour le diner.



On va finalement retourner au restaurant qui était sur le point de fermer la veille... et qui est une bonne adresse au final. Installés en sous sol, avec une déco pleine de vieux objets d'antan, ça met déjà dans l'ambiance. La serveuse, une peu bizarre mais toujours souriante, nous conseille sur les plats. Je prendrais un genre de bœuf à la sauce moutarde et on se laisse tenter par les desserts qui ne sont pas chers du tout...


Après tout ça, nous sommes prêts pour une petite balade digestive... 
La place de l'hôtel de ville a retrouvé son calme, maintenant que le marché médiéval est fermé...


Et les rues aussi ont été nettoyées de leurs touristes, de quoi faire de jolies photos sous le soleil couchant...



Et si nous sortions un peu des murailles de la vieille ville? Nous nous retrouvons très vite sur la place de la liberté où la foule s'apprête à regarder un match de la coupe du monde sur le grand écran installé à cet effet. Ce soir ce sont les russes qui jouent, et il y a plein de supporters prêts à acclamer leur équipe, drapeau à la main. La communauté russe représente encore de nos jours la première minorité étrangère en Estonie...
C'est sûr ce soir ils vont gagner!
Malheureusement pour eux c'est bien la Croatie (encore elle) qui va gagner ce soir...


Nous continuons notre balade par les petites rues qui contournent la vieille ville. Revoici le cinéma SOPRUS... 


En ce soir d'été les terrasses des bars branchés font le plein, avec de la bonne musique qui va bien et tout pour passer une bonne soirée...


Nous continuons notre chemin en contournant la vieille ville...
Il est 22h passé mais on y voit comme en pleine journée. 


Nous longeons un parc public au centre duquel siège une fontaine pleine de mousse. 
Je ne sais pas si cela est fait exprès ou si un petit malin s'est amusé à verser du bain moussant...



Un peu plus loin il y a un genre de grande sculpture moderne, ligne noire coupée, hommage aux naufragés du ferry Estonia qui a sombré pas loin d'ici en 1994.
Il est à contre-jour et c'est trop sombre pour que je puisse en prendre de bonnes photos...



Sur le chemin qui nous mène à notre appartement, Pierre-André me fait remarquer quelque chose qui bouge derrière ce bulldozer... un lièvre! 
En pleine ville? Sur un chantier? Tallinn est vraiment une ville étonnante...


On repère notre arrêt de bus pour demain, puis nous rejoignons notre home sweet home.
On a eu une journée chargée, alors on a bien le droit de se reposer un peu...
Et puis enfin la catastrophe de la journée: le chargeur des batteries de mon appareil photo ne marche plus! Un instant de panique (comment vais-je faire pour continuer mon reportage photo?) puis on s'aperçoit qu'en laissant un meuble appuyé sur le rebord du chargeur, celui-ci fonctionne.
On va se débrouiller comme ça pour l'instant...
Bon allez demain réveil à 8h30!
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