Paris - Jour 6 - Partie 2 - Aux grands hommes

Nous voici donc dans le métro en route vers une destination qui n'était pas prévue au programme, mais qui va s'avérer pleine de découvertes, j'en suis sûr. 
Nous voici arrivés à la gare de métro Jussieu, juste devant l'entrée de la célèbre université...


Je crois que je n'ai jamais pénétré dans l'enceinte de la faculté... ça vous dirait d'aller y faire un tour? 
En ce moment ce sont les vacances, donc les lieux sont presque vides. Mais il y a quand même un contrôle de sécurité à l'entrée.


L'architecture de ce bâtiment, c'est avant tout du béton et de l'acier dans le plus pur style des années 60. 
Conçu initialement pour accueillir 20000 personnes, les plans originaux n'ont jamais été terminés, faute de moyens, mais aussi parce que le nombre d'étudiants avait entre temps fortement augmenté (30000): on préféra construire de nouveaux campus à l'extérieur de Paris.


L'architecture typiquement moderniste des lieux était également passée de mode... c'est vrai que ce n'est pas forcément très beau.
Les bâtiments forment des barres d'immeubles perpendiculaires en grilles, d'où leur surnom de "Grill d'Albert" (c'est le nom de l'architecte). Au centre il y a la grande tour Zamansky (90 mètres), qu'il a fallu totalement désamianter dans les années 2000.


Sur certains murs, il reste encore quelques affiches de la manif étudiante d'il y a quelques mois. Mai 68... c'était il y a 50 ans!


On croise quand même quelques étudiants. Il semble même y avoir un genre de réception avec des entreprises venues recruter de nouveaux diplômés devant quelques canapés et petits fours...


Voilà c'est tout ce que j'avais à dire sur l'université de Jussieu...
Si vous le voulez bien, nous allons maintenant continuer notre balade à l'intérieur du Quartier latin, quartier étudiant et historique. 


Les anciennes arènes de Lutèce sont juste sur notre chemin, l'occasion pour nous de les traverser.
Construites au IIème siècle, elles furent peu à peu abandonnées et les pierres recouvertes de terre de remblais pour être remises à jour lors de fouilles à partir de 1869 (comme c'est inscrit au dessus de l'entrée).


A l'époque gallo-romaine ces arènes pouvaient accueillir jusqu'à 17000 spectateurs, et on y montait des combats de gladiateurs mais aussi des pièces de théâtre. 
Les spectacles antiques ont maintenant laissé place à une exposition de photos et à quelques joueurs de pétanque. 



Le coin est assez vallonné. D'ailleurs on l'appelle "la montagne Sainte Geneviève". 
Attendez vous donc à ce que ça monte un peu. 
Vous l'avez vu? Il y a là aussi quelques space invaders dans les parages...


Il n'y a pas de marché place Monge ce matin, mais des employés sont en train d'installer une partie des étals.


Nous entrons enfin dans le quartier Mouffetard, connu pour ses petits restaurants et ses commerces de bouche, une rue typiquement parisienne qui attire tous les touristes étrangers de passage.


Je n'ai pas vraiment le temps de fureter parmi les commerces de bouche. D'autant plus qu'il est bientôt l'heure de déjeuner...


Dans mes souvenirs la place de la Contrescarpe était plus animée. Jadis populaire et fréquenté par les étudiants, le quartier a certainement perdu un peu de son âme avec le tourisme...


C'était aussi un quartier à la mode durant les années folles, fréquenté par tout le gotha américain. Ernest Hemingway a habité ici par exemple...



Lors d'une précédente excursion dans le coin, je me rappelle avoir mangé de la raclette, mais je ne retrouve plus le restaurant... J'ai dû me tromper. 
Je finis par déjeuner à la grande brasserie de la place de la Contrescarpe. C'est un peu cher, mais je vais me régaler: brochette de thon en plat principal et Pavlova en dessert.
A la table à côté, deux boursicoteurs parlent de leurs affaires et de leurs richissimes connaissances...


La peau du ventre bien tendue, je me remets en route pour une petite balade dans le quartier, et plus précisément en direction du Panthéon, qui va bien finir par apparaître au détour d'une rue...


Ces affiches dédiées à la mémoire de Simone Veil vont me mettre sur la voie: elle vient juste de faire son entrée au Panthéon il y a quelques mois... Merci Simone!


Et donc, à l'angle du Lycée Henry IV, nous voici nez à mur avec le Panthéon. 
C'est dans ce lieu - dont le nom fait référence au Panthéon de Rome, et plus généralement au panthéon des Dieux grecs - que sont honorés les grands personnages de l'Histoire de France.
Et grand, c'est bien le mot: 110 mètres de long pour 84 de large, ce bâtiment massif est surmonté d'un dôme de 83 mètres de haut.


Mais avant d'envisager de pénétrer dans le temple des grands hommes, mon regard est attiré par les panneaux décrivant justement la vie et le combat de cette avocate et grande femme d'état que fut Simone Veil.
Cela commence avec le souvenir du camp d'Auschwitz où elle fut déportée pendant la guerre. Epargnée de la chambre à gaz par une capo qui la trouvait trop belle pour mourir, elle travailla dans l'administration du camp et fut la seule rescapée de la famille en compagnie de sa sœur.


A la libération, elle retourne à Paris et se lance dans les études en réussissant son bac, puis en faisant des études de droit durant lesquelles elle rencontre son futur époux. 
Devenue avocate, elle défend d'abord les femmes terroristes durant la guerre d'Algérie puis elle s'engage politiquement. Tout d'abord en aidant à la rédaction de la loi autorisant la pilule puis en devenant ministre et en défendant la loi sur l'IVG tant décriée à l'époque...


Les panneaux suivants évoquent son engagement européen, son retour à Auschwitz en compagnie de sa famille, puis son entrée à l'académie française. Pour ce dernier évènement elle avait, comme il est de coutume, choisi la décoration de son épée d'académicienne, et elle a choisi d'y mettre son numéro de matricule des camps de concentration accompagné d'une branche d'olivier.



A la demande de sa famille, elle est entrée au Panthéon en compagnie de son époux dont elle ne souhaitait pas être séparée...
Il est temps pour nous aussi d'entrer au Panthéon, et nous ne sommes pas les seuls: il y a une longue file d'attente pour acheter un ticket. Je décide de ruser et d'acheter mon billet en direct sur internet depuis mon smartphone... ça marche! Je passe carrément devant tout le monde.


Avec le ticket d'entrée, on a droit à un audioguide à 3€, avec plein d'explications intéressantes. Par contre j'aurais un peu de mal à me situer sur le plan.


Elle est quand même grande cette ancienne église Sainte Geneviève, que l'on décida de reconvertir en lieu de sépulture des héros nationaux à la Révolution. 
L'architecte Souflot utilisa toutes les techniques le plus modernes de l'époque ( avec une armature en fer par exemple) afin de faire un bâtiment immense et tout en démesure...


A l'origine donc, l'église fut construite par Louis XV pour remercier le ciel de l'avoir guéri d'une crise de goutte (enfin je crois). Et d'ailleurs plusieurs fresques sur les murs évoquent son passé d'église en évoquant la vie de Sainte Geneviève, sainte patronne de Paris.



Débutée en 1764, l'église fut terminée en pleine Révolution française. A cette époque là, on cherchait un tombeau plus honorable pour Voltaire, père de la Nation, car l'église dans laquelle il était enterré devait être détruire. L'idée d'un "Panthéon des Grands Hommes", lieu de sépulture des héros nationaux, était née.


Commençons par jeter un œil sur les grandes fresques qui évoquent les grands moments de l'Histoire de France, de Saint Louis à Jeanne d'Arc...
La décoration des lieux a été maintes fois modifiée, au grès des différents régimes politiques qui se sont succédés. Napoléon a même rendu à l'église sa fonction religieuse... et Louis Philippe la retransforma en panthéon.


Cette fresque ci évoque Clovis et la bataille de Tolbiac. Vous connaissez l'histoire? 
Moi j'avoue que je suis nul en Histoire de France. Mais l'audioguide m'en dit un peu plus: voyant la bataille perdue, et ne sachant vers quel dieu païen se tourner, il fit la promesse de se convertir au christianisme - la religion de son épouse - si Dieu lui accordait la victoire. 


Il y a aussi quelques sculptures monumentales, comme celle évoquant le naufrage de la bataille du 13 Prairial, et qui fut installée ici juste avant la guerre de 14-18 (comme pour galvaniser les visiteurs dans un élan patriotique)...
Avant que  sombrer, on dit que les marins auraient agité un drapeau français en scandant "Vive la Nation, vive la République!".


Tout au fond se trouve le groupe représentant la convention nationale et les députés prêtant serment à la République.
L'ensemble est situé à l'endroit où se trouve d'habitude l'autel dans une église, et a donc une valeur très symbolique... Ensuite on dirait un peu qu'ils font le salut nazi, non?


A certains endroits, les traces de l'ancienne fonction de l'église n'ont pas pu être effacés, comme cette fresque dorée représentant Jésus donnant la gloire à Paris.
C'est vrai que c'est vraiment étrange cet édifice: il ressemble à une église sauf que les fresques et les statues n'ont plus rien de religieux. Un peu comme une religion d'état...



Dans une salle annexe, on peut observer une maquette du Panthéon, avec une coupe montrant son armature en fer. L'architecture, inspirée des temples grecs, annonce les débuts du classicisme...



Au milieu de tout ça il y a une œuvre d'Art contemporain: un grand écran qui diffuse des courts textes évoquant les arbres... Un peu bof...




Allons plutôt au centre de l'édifice, sous la voute, afin de voir de nos propres yeux la Terre tourner. 
En 1851, Foucault eut l'idée de suspendre un pendule de 28 kg sous les 70 mètres qui séparent le sol et la coupole du Panthéon. 



En se balançant, le pendule dévie de 2.5 cm à chaque battement et revient à son point de départ en 35 heures. C'est l'effet de la force de Coriolis.
"Venez voir la Terre tourner", c'est avec ces mots que l'on invitait le public à venir voir l'expérience à l'époque...


Descendons maintenant dans la crypte... "Entre ici, Akaieric!  Avec ton terrible cortège!" 
Dans l'escalier se trouve un cénotaphe avec le cœur de Gambetta. Au début il devait entrer au Panthéon en 1920 en même temps que le corps du soldat inconnu, ce qui divisa l'opinion, certains argumentant qu'un vulgaire inconnu ne pouvait être enterré parmi les Grands Hommes. 


Les Sénateurs décidèrent alors de mettre son tombeau à sa place actuelle, sous l'Arc de Triomphe...
En effet c'était au Sénat qu'était à l'époque décidé et voté les noms des personnalités qui seraient enterrées ici...
Aujourd'hui c'est plus simple, c'est le président de la République qui choisit.


Contrairement à l'église qui baignait dans la lumière, tout ici est plus sombre... On se croirait dans un tombeau égyptien...


La visite commence par le vestibule où se font face les tombeaux de deux pères de la Nation: Voltaire et Rousseau. Alors que le philosophe des lumières apparaît dans sa robe de chambre favorite, la tombe du grand naturaliste est agrémentée de fleurs de pierre, symboles de la nature...



On continue notre chemin, de couloir en couloir...
Finalement ça a l'air assez vide, car il reste encore pas mal de places de libre: 81 occupants à l'heure actuelle pour au total 300 tombeaux disponibles...
De plus les différentes cellules semblent être organisées de façon thématique, ou par époque.


De ce côté-ci sont réunis les tombeaux des scientifiques, avec Pierre et Marie Curie
Il parait que le cercueil de Marie Curie est recouvert de plomb, à cause de la radioactivité encore présente dans son corps...
On trouve aussi ici le mathématicien Joseph Louis Lagrange: "Pour tout sous-groupe H d'un groupe fini G, l'ordre de ce sous groupe divise celui de G". C'est loin tout ça...


Un ensemble de caveaux est dédié aux héros de la seconde guerre mondiale: Malraux et Jean Moulin (tous deux résistants) sont voisins, mais aussi Simone Veil (rescapée des camps de la mort) qui a été ensevelie avec son mari (la famille ne souhaitant pas les séparer).
A la fin de la guerre, faire entrer Jean Moulin au Panthéon était un moyen de réconcilier les français en montrant un visage unique de résistance face aux nazis (ce qui n'était pas forcément le cas à l'époque).


La lutte pour les droits de l'Homme et contre l'esclavagisme et le colonialisme ne sont pas oubliés, avec le tombeau de Victor Schoelcher ainsi que celui de Félix Eboué (première personne de couleur à entrer au Panthéon) ...


Certains héros ne sont pas enterrés ici mais une plaque leur a été dédiée officiellement. C'est le cas d'Aimé Césaire, écrivain de la négritude, de Toussaint Louverture, révolutionnaire et libérateur d'Haïti, et de Louis Delgrés, héros guadeloupéen et abolitioniste.


L'entrée de Jean Jaurès au Panthéon en 1924 fit scandale car elle fut critiquée par la droite qui n'appréciait pas que le pouvoir en place, socialiste, fasse entrer ce gauchiste, dreyfusard et qui plus est pacifiste dans le temple des Héros...



Voici le tombeau de Louis Braille, inventeur de l'alphabet qui porte son nom. J'ignorais qu'il était lui même non-voyant.
Il fut transféré ici 100 ans après sa mort. Seules ses mains sont restées dans la tombe du cimetière de son village d'enfance, où il souhaitait être enterré.  


Emile Zola et Victor Hugo sont dans le même caveau... et doivent bien échanger quelques vers de temps en temps.


S'ensuivent plusieurs caveaux de héros Napoléoniens inconnus au bataillon...
L'empereur fit entrer ici bon nombre de ses généraux. C'était un moyen pour lui d'utiliser l'entrée au Panthéon comme instrument politique, pour fédérer le pays et fidéliser ses collaborateurs.
"La France a besoin de marbre" qu'il disait le gars...


Voilà je crois qu'on a fait le tour. Il ne reste que quelques caveaux vides, dont certains sont utilisés comme débarras.
Finalement cette visite fut assez rapide... mais très intéressante.


Nous allons en profiter pour, une fois sortis, aller visiter l'église attenante, Saint Etienne du Mont. D'après mon souvenir c'est l'une des plus belles petites églises de Paris...


L'intérieur est élégant, vous ne trouvez pas? L'architecture est un mélange de gothique flamboyant et de Renaissance...
Le genre de portique suspendu en pierre s'appelle un jubé et c'est unique à Paris.


C'est ici qu'ont finalement été ensevelies les restes de Sainte Geneviève (à défaut d'être dans le grand Panthéon, juste à côté).
La sainte est vénérée pour avoir protégé Paris de l'invasion des Huns en 451.


Voilà, il ne nous reste plus qu'à descendre de la 'montagne' Sainte Geneviève pour continuer notre journée de balade, en prenant un petit milk shake au passage...
Tiens, vous avez remarqué ce graff représentant Victor Hugo sur le mobilier urbain? C'est une oeuvre du street artist C215. Il en a fait toute une série dans le coin, justement sur les résidents du Panthéon. 

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